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entretien avec annabelle buxton


Parcours

J'ai commencé mes études à Estienne, à Paris, en DMA illustration. L'école était à la fois très scolaire
et sécurisante : on avait des devoirs à rendre et étions très surveillés quant à la présence et à l'assiduité
en cours, avec des feuilles de retard comme au lycée...
On y était aussi très privilégiés en suivi et
en matériel. La suite de mes études aux Arts décoratifs
de Strasbourg (toujours en illustration), était très différente : il fallait tout faire par soi-même.
C'était une toute autre façon de travailler, finie
la pouponnière d'Estienne. Strasbourg nous mettait
déjà un pied dans la vie professionnelle en nous
poussant à nous prendre en main.

 

Comment ton travail a t-il évolué entre Estienne et Strasbourg?

À Estienne, je réalisais davantage de l'image pleine, comme dans le livre illustré traditionnel. En arrivant à Strasbourg, la bande dessinée moderne et le dessin contemporain m'ont beaucoup nourrie, notamment le travail d'auteurs comme Brecht Evens ou Olivier Schrauwen – qui mêlait l'illustration et l'art séquentiel. J'aimais cette démarche qui consistait à utiliser différentes grammaires de l'image pour réaliser des livres. La création de la revue Nyctalope aux Arts décoratifs de Strasbourg a été très importante dans ma recherche.

Une revue qui mêlait à son tour plusieurs pratiques différentes de l'image imprimée : graphisme, bande dessinée, illustration... la recherche et la liberté permises par la revue étant importante pour se construire. Nos professeurs, Joseph Béhé, Gaëtan Dorémus, Guillaume Dégé, nous poussaient à développer nos propres systèmes de narration. Parfois sans texte, parfois avec des éléments contraignants ou en bousculant nos habitudes graphiques
en utilsant des nouveaux outils.

 

Comment as-tu abouti à tes images actuelles?

En arrivant à Strasbourg, j'avais déjà touché à pas mal de techniques: le crayon, la gouache, l'aquarelle, la gravure... mais je ne trouvais toujours pas des images satisfaisantes. J'ai commencé à créer des pochoirs avec du scotch repositionnable, je découpais des formes pour les peindre ensuite, ce qui me permettait d'obtenir au pinceau des traces et des matières qui rendaient mes images moins froides. J'ai donc continué à chercher. Les traces et les matières obtenues avec le pinceau m'intéressaient, j'ai ensuite continué à peindre en mettant des enduits sur mes feuilles avant pour obtenir des peintures qui n'adhéraient pas au papier.

Au fur et à mesure j'ai utilisé le plastique et le rodoïd pour peindre et assembler des images, j'ai pris des pointes sèches et des scalpels pour graver et dessiner dans les aplats. Tout s'est mis en place à la toute fin de mes études à la parution de "Nyctalope 4" qui publiait mes premiers travaux.

 

Pourrais-tu nous résumer "Le Tigre blanc" ?

Un enfant se dispute avec ses parents et se change en tigre pour les dévorer. Il fuit sa maison et se retrouve à errer de plus en plus loin de chez lui. Il va se retrouver confronté à toutes sortes d'obstacles et de dangers qu'il tentera chaque fois de surmonter en ayant recours à ses métamorphoses. Hélas pour lui, chaque transformation l'amène toujours vers de nouveaux ennuis... Confronté à la solitude et à l'éloignement, il se rend compte qu'il est encore trop jeune pour s'affranchir de ses parents. Débarrassé de leur autorité, il se retrouve surtout privé de leur amour et de son foyer. Il finit par accepter de simplement redevenir lui-même et ne plus se réfugier derrière un autre personnage.

 

Comment ce personnage est-il né?

À partir d'une planche où j'avais dessiné une multitude de personnages. Le tigre blanc se trouvait parmi eux et c'était celui qui m'attirait le plus. Je ne le voyais pas comme un vrai tigre, mais comme quelqu'un qui se serait travesti en fauve avec un déguisement. Quelles sont les lectures qui t'ont marquée enfant? Lors d'un séjour en Europe de l'Est avec mes parents, je ne pouvais pas quitter des mains un livre de Michel Tournier: Pierrot ou les secrets de la nuit, illustré par Danièle Bour. C'est mon premier souvenir d'un rapport fusionnel avec un livre.

 

Adulte?

Marcel Aymé, "Le Passe Muraille". J'aime aussi beaucoup les nouvelles de Buzzati, Borges, Casares.

 

Ton rapport au livre?

Mon rapport au livre est d'abord affectif. C'est un objet dépositaire de souvenirs, de sensations, qui lui sont spécifiquement attachés. J'aime beaucoup la notion d'usure autour d'un livre, le temps qui passe dessus et modifie son aspect et notre rapport avec lui.




propos reccueillis par JM
09/2012



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